“Missing From Fire Trail Road » met en lumière le cas non résolu de la disparition en novembre 2020 de Mary Ellen Johnson-Davis de la tribu des Tulalip dans l’Etat de Washington. ce documentaire coup de poing  sur la situation des indiens en général a été  présenté samedi au Tribeca Film Festival à New York a un public en état de choc. Pour le soutenir nous offrons notre article gratuitement et le lien vers le gofoundme pour aider aux recherches. Selon le Centre national de formation sur la justice pénale :

Le taux de femmes autochtones assassinées aux États-Unis est 10 fois plus élevé que dans toute autre ethnie.

4 femmes autochtones sur 5 sont victimes de violence.

3 femmes autochtones sur 5 sont violées.

Le documentaire de Sabrina Van Tassel sera bientôt diffusé sur Canal +. A voir donc. 

Cagnottes organisées par Sabrina Van Tassel : Missing from Fire Trail Road Campaign (gofundme.com)

[ARTICLE OFFERT]

VU DES US. «Missing From Fire Trail Road» met en lumière le cas non résolu de la disparition en novembre 2020 de Mary Ellen Johnson-Davis. Il a été présenté samedi au Tribeca Film Festival à New York, devant un public en état de choc.

«Nous méritons que notre histoire soit racontée. C’est pour ça que nous sommes là », racontent à la fin de la projection de «Missing From Fire Trail Road», Nona, Geri et Terri, les témoins et les sœurs de Mary Ellen JohnsonDavis. Cette Indienne a disparu en novembre 2020 sur un sentier. Le documentaire poignant de Sabrina Van Tassel, sera diffusé en France par Canal +, coproducteur, et est en discussion pour une programmation avec Hulu aux Etats-Unis. Samedi au Tribeca Film Festival à New York, les invitées prennent la parole, émues. Ces Indiennes d’Amérique, les «Native Americans» comme on les appelle là-bas, se sont déplacées pour raconter les ravages de l’alcoolisme, de la drogue, de l’abandon des peuples colonisés et même l’invisibilisation de cette population, douleur plus sournoise qui provoque des ravages non moins terribles.

Jamais arrivée chez son amie

«Ils ont quitté leur réserve de Tulalip, à Washington State, pour raconter la disparition de Mary Ellen. Le Federal Bureau of Investigation’s Seattle Field Office et la Tulalip Tribal Police ont enquêté sur la disparition de la jeune femme, vue pour la dernière fois le 25 novembre 2020, marchant vers l’est sur Firetrail Road dans la réserve Tulalip dans l’État de Washington. Mary se rendait chez une amie et n’est jamais arrivée. Sa disparition a été signalée le 9 décembre 2020. L’enquête étant au point mort, ses sœurs et d’autres membres de la tribu partent découvrir ce qui lui est arrivé. Leur quête révèle une dure réalité : les femmes autochtones sont assassinées à un rythme alarmant.

Selon le Centre national de formation sur la justice pénale, le taux de femmes autochtones assassinées aux États-Unis est 10 fois plus élevé que dans toute autre ethnie. Et ce n’est pas tout : 4 femmes autochtones sur 5 sont victimes de violence, 3 femmes autochtones sur 5 sont violées, 2 femmes autochtones sur 5 sont victimes de trafic, comme le raconte le documentaire. «Et ça ne fait jamais la Une des médias !», s’insurge un témoin. «Beaucoup de jeunes femmes errent, livrées à elles-mêmes et il est difficile de retracer leur parcours», explique un policier. «Dans l’affaire de Mary Ellen, nous n’avons pas de corps, donc nous ne pouvons restreindre aucun suspect potentiel», explique le shérif. Le FBI se heurte en outre à des problèmes juridiques.

Mary Ellen est malheureusement une Indienne comme la plupart des autres : elle a connu les abus sexuels dans sa jeunesse, à son école. C’est une maman qui a dû faire face à ses traumas en se réfugiant dans l’alcool et la drogue. Qui est son meurtrier ? Son mari, son dealer, des ouvriers ? Son entourage mène l’enquête là où les autorités devraient s’en occuper. En cause ? Un conflit de législation entre les lois fédérales, l’État de Washington et la réserve. Les uns et les autres se renvoyant la balle.

Une réalité poignante à voir sur grand écran

La réalisatrice Sabrina Van Tassel utilise sa disparition comme un fil d’Ariane pour dérouler habilement la réalité concrète et le quotidien des « ex » tribus américanisées avec un angle d’une crudité assumée, afin de tirer le signal d’alarme des problèmes sociétaux qui perdurent. Car la réalité de ces peuples autochtones est particulièrement difficile. Lire le sort des Indiens dans un livre d’histoire est une chose, le voir sur grand écran, à Tribeca, est poignant. «Notre population tribale compte plus de 5 100 personnes et continue de croître, avec 2 700 membres résidant dans la réserve indienne de Tulalip, d’une superficie de 8.900 hectares.

Le drame des Indiens autochtones Nous sommes situés au nord d’Everett et de la rivière Snohomish et à l’ouest de Marysville, Washington», expliquent les représentants de l’association Tulalip Tribes, une organisation non gouvernementale. Toute la famille est meurtrie, des sœurs aux enfants, mais la communauté se soulève, portée par des leaders, comme Teri Gobin, chef de la tribu des Tulalip, une figure matriarcale très forte qui les épaule dans leurs recherches.

Les dysfonctionnements de tout un pays pointés du doigt

L’accent est mis sur les Boarding schools, des écoles pour apprendre aux ex-tribus à «s’américaniser» et qui ont été le théâtre d’abus sexuels inouïs. Et de nombreuses disparitions d’enfants «de 6, 12, 23 ans» explique un témoin. Car Mary Ellen est loin d’être un cas isolé. Selon la patrouille de l’État de Washington, 122 cas de disparition de personnes autochtones sont recensés. Deborah Parker, une activiste et ancienne kidnappée, raconte ce corps retrouvé dans un frigidaire dans un fossé. Shery Guzman, elle, narre l’histoire d’une femme violée sur un chemin forestier, torturée de manière monstrueuse : «la victime était à peine reconnaissable». Dans «Missing From Fire Trail Road», les survivantes témoignent, avec toutes un leitmotiv : elles se sentent «à disposition des hommes blancs».

À travers l’histoire de Mary Ellen, ce sont les dysfonctionnements de tout un pays qui sont pointés du doigt. Avec cependant quelques espoirs : la National Native American Boarding School Healing Coalition (NABS) dirige un mouvement pour la vérité, la justice et la guérison pour les peuples autochtones touchés par les États-Unis. Des fonds ont été levés. Des initiatives sont tentées, même si tout parait toujours insuffisant. Il existe néanmoins une démarche collective en vue d’inverser la vapeur et rétablir certaines logiques. Une démarche pédagogique tente de redonner à ces peuples autochtones une légitimité à revendiquer leurs origines. Des écoles sont ouvertes pour réapprendre aux élèves à parler leur langue et renouer avec leur culture effacée. Une campagne nationale a été lancée dans le prolongement du film, dont les fonds iront en partie aux organisations MMIW et en partie à NABS. «Le but est de voyager avec le film à travers les tribus amérindiennes», nous explique Sabrina Van Tassel et d’apporter «tous les outils dont nous disposons pour empêcher les disparitions de personnes autochtones et pour mobiliser des ressources lorsqu’elles se produisent».

Si quelques hommes sont à leurs côtés, ce combat est en grande partie mené par des femmes. « Nous sommes fortes et nous sommes ici pour en témoigner. Nous sommes des survivantes », a ainsi scandé la cheffe de la tribu, Teri Gobin, la chef des Tulalib, qui parcourt inlassablement les sentiers pour retrouver l’une des siennes et est devenue la porte-parole de cette cause sur tout le territoire, en espérant une résonance internationale.

Le travail de Sabrina Van Tassel a déjà été facteur de changements

L’un de ses précédents documentaires, «The State of Texas vs. Melissa», portait sur Melissa Lucio, une femme condamnée à mort pour le meurtre de sa fille. Le documentaire affirmait qu’il s’agissait d’une condamnation injustifiée. Il a également été présenté en avant-première à Tribeca et est désormais disponible sur Hulu. Il a galvanisé une campagne publique de soutien à Lucio. Sa condamnation à mort a été annulée en avril 2022, en partie parce que le procureur avait dissimulé des preuves à la défense. «Bien sûr, cela me dit que tout est possible, a déclaré la réalisatrice. Il y a de la magie dans le cinéma, il y a de la magie dans les documentaires».

Sabrina Van Tassel, journaliste et réalisatrice franco-américaine née en France, a trouvé dans cette histoire un écho avec sa propre famille et celui lui a permis de comprendre le rôle des traumatismes intergénérationnels liés à la colonisation. Au XVIIe siècle, l’un de ses ancêtres hollandais a épousé la fille du chef d’une tribu de Montauk. Enfant, elle imaginait cette histoire comme un conte de fées, avant de réaliser à l’âge adulte qu’il s’agissait probablement d’un viol. «En tant qu’Américains, nous avons tous, d’une manière ou d’une autre, des oppresseurs et des opprimés dans notre famille», a-t-elle déclaré.

Sandra Muller Correspondante à Tribeca

 

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